Hitchcock ou la tentation fantastique

Publié le par alien-azimutée

Une excellente référence sur Hitchcock :          Hitchcock        

         Hitchcock, dans nombre de ses films, semble utiliser les clés du genre fantastique. Celui-ci est d'abord défini par Tzvetan Todorov, grand théoricien de la littérature comme l’hésitation du lecteur entre l'acceptation du surnaturel en tant que tel et une tentative d’explication rationnelle face aux évènements étranges qui lui sont présentés. Ce genre naîtrait de l'hésitation provoquée chez le lecteur par le récit, celui-ci ne sachant plus quelle interprétation donner aux événements. Or, dans ses films, Hitchock semble jouer en permanence avec les certitudes de son spectateur, l'impliquant pleinement dans différentes enquêtes où interviennent de nombreux événements inexplicables et étranges, qu'il pourrait interpréter comme des faits surnaturels. Le réalisateur décide cependant, la plupart du temps, de donner une explication parfaitement rationnelle à ses intrigues. Cependant, le fantastique se définit également par la mise en relation de deux opposés, deux mondes contraires : la vie et la mort, le rêve et la réalité, créant également un doute chez le lecteur quand à l'univers qu'on lui présente. Est-il réel et ou imaginaire. On retrouve une fois de plus ces thèmes dans l'œuvre du cinéaste. De plus, celui-ci ne nie pas l'influence de certains courants cinématographiques directement liés au fantastique tel que l'expressionnisme allemand. Je me propose donc d'étudier ici cette influence du fantastique sur l'œuvre d'Hitchcock à travers trois pistes : Le doute installé chez le spectateur par le suspens, la frontière entre rêve et réalité ou la logique du rêve, le thème du fantôme, du double et de l'illusion.

Le spectateur en proie au doute du début au dénouement de l'intrigue : le suspens au service du fantastique

         On attribue souvent à Hitchcock le titre de « Maître du suspense », et pour Jean Douchet : « Il convient de l'envisager comme la principale définition de l'œuvre Hitchcockienne. ». Le suspens tire son origine ,selon lui,de la perception temporel du spectateur qui est plongé dans l'attente d'un dénouement face à une situation catastrophique. Si l'on se reporte à la définition du fantastique que propose Todorov, on peut remarquer que ce genre, lui-aussi, plonge son lecteur dans une forme d'attente, puisqu'il ne sait quelle interprétation donner aux évènements. Il en va de même pour le suspense dans les films d'Hitchcock. C'est bien souvent à la dernière minute du film, une fois tous les éléments de l'intrigue retrouvés et assemblés, que le spectateur peut enfin donner un sens à celle-ci. Avant cela, il est maintenu dans le doute sur l'interprétation qu'il doit donner aux évènements : Est-ce que le personnage qui vit ces phénomènes étranges est victime d'une illusion, d'un piège ? Le personnage est-il réellement sain d'esprit ?, etc. On peut notamment citer Sueurs froides en exemple. L'enquête qui se déroule au cours du film semble reposer sur le suspense, incarné ici par  une jeune femme énigmatique : Madeleine. Chaque élément de l'intrigue est alors détaillé par Hitchcock pour amener peu à peu son auditoire au dénouement de l'enquête, cela dans une atmosphère de tension permanente, puisque bien que tous les éléments soient sous nos yeux, de même que sous ceux du détective, ce dernier ne voit pas venir le piège qui lui est tendu, et entraine avec lui le spectateur dans cette quête effrénée d'indices. Jusqu'aux dernières minutes du film,  le spectateur ne peut donner de véritable interprétation des évènements. Hitchcock  semble  donc utiliser ici le suspense dans le simple but de maintenir une hésitation fantastique chez son spectateur : Madeleine est-elle réelle ? A-t-elle été réellement possédée par son aïeule ? Tout cela n'est-il qu'une mise en scène ?

Un univers à la frontière du rêve et de la réalité : la logique du rêve

         Il existe chez Hitchcock une volonté de laisser le doute s'installer chez le spectateur. Cette volonté s'exprime dans la construction même de l'image chez ce réalisateur. En effet, celui-ci crée dans ses films, un univers tout à fait crédible pour le spectateur, et cependant totalement invraisemblable : un univers à la frontière de l'imaginaire et du réel, du rêve et de la réalité. On peut citer comme exemple Sueurs froides (Vertigo), où la structure même du film semble être construite sur ce jeu entre réel et imaginaire, invitant le spectateur à plonger peu à peu dans un univers fantasmatique, irréel. Le personnage de Madeleine, sorte d'illusion fantomatique, semble alors une sorte de guide pour le spectateur ainsi que pour le détective, qui la poursuivent tout au long des décors, jusqu'à ce que ceux-ci ne soient plus que des sortes de tableaux dénués de toute vraisemblance, auxquels pourtant Hitchcock parvient à nous faire croire.

Des thèmes récurrents : le double, le fantôme, l'illusion

         Si les films d'Hitchcock semblent emprunts de fantastique, cela est du en grande partie au thèmes qu'il exploite dans ceux-ci, reprenant de nombreuse thématique fantastique et notamment le thème de l'illusion, tel que le personnage de Madeleine dans Vertigo, ou du fantôme. Son film Rebecca en est un frappant exemple. Il traite de l'emprise fictcive de Rebecca, épouse défunte de Maxim de Winter, sur son époux, sa gouvernante et sa nouvelle épouse. Ainsi, tout au long du film, son fantôme semble hanter les lieux. Cela notamment grâce au jeu subtil qu'Hitchcock met en place pour nous rappeler sa présence : chaque détails de l'image semble nous la rappeler, sur chaque morceaux de draps apparaissent ses initiales, et l'éclairage lui même participe à donner à cette demeure, l'allure d'un château hanté. Le réalisateur exprimera d'ailleurs lui-même cette volonté de donner au lieu un rôle primordiale dans l'action : « Le film est l'histoire d'une maison ; on peut aussi dire que la maison est un des trois personnages principaux du film. Souvenez-vous que la maison n'avait aucune situation géographique; elle était complètement isolée. C'est instinctif de ma part. Je dois garder cette maison isolée pour m'assurer que la peur y sera sans recours. ». Ceci n'est pas sans rappeler la célèbre nouvelle fantastique d'Edgar Allan Poe : La Chute de la maison Usher.

 

 

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